Cette revue de presse, qui ne prétend aucunement à l’exhaustivité, entend mettre en avant des articles et chroniques qui me paraissent éclairants sur la crise que nous traversons, nous aider à prendre de la hauteur pour en saisir tous les enjeux et nous aider à construire l’après.
Elle fait partie du projet Sortir grandis et transformés de la crise Covid-19
Démasqués, chronique de Flore Vasseur – La Croix – 25 mars 2020
Extrait :
« (…) L’affaire des masques ne date pas d’hier. Emblématique et terrible, elle est la fille d’un système de croyances qui a pris le pouvoir. Les ratios économiques, ceux de Maastricht, des marchés financiers, ont gangrené la sphère politique, contaminé son personnel. Ces critères définissent l’action publique et réduisent les citoyens à leur statut d’agent économique, de variable d’ajustement. Nous avions presque fini par trouver cela normal. Ce virus nous tire de là, hurle que nous sommes des corps, de chair et de sang, comme tous les êtres vivants, bien seuls face à cette logique de mort qui je le crains, a atteint le cœur de nos « dirigeants ». Démasqués, ils martèlent que les masques ne servent à rien, qu’on ne saurait les utiliser, qu’ils ne veulent pas de polémique. Dégainent les drones pour nous surveiller. (…) »
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« Rester confiné chez soi, sur son canapé, n’a strictement rien à voir avec une période de guerre », chronique de Maxime Combes – Bastamag – 18 mars 2020
Extrait :
« (…) Oui, les mots ont un sens. Nous ne sommes pas en guerre car la pandémie à laquelle nous sommes confrontés exige des mesures plutôt opposées à celles prises en temps de guerre : ralentir l’activité économique plutôt que l’accélérer, mettre au repos forcé une part significative des travailleuses et travailleurs plutôt que les mobiliser pour alimenter un effort de guerre, réduire considérablement les interactions sociales plutôt qu’envoyer toutes les forces vives sur la ligne de front. (…) Cette référence à la « guerre » convoque par ailleurs un imaginaire viril peuplé d’héroïsme masculin – bien que largement démenti par les faits – et du sacrifice qui n’a pas lieu d’être. Face au coronavirus – et à n’importe quelle pandémie – ce sont les femmes qui sont en première ligne : 88 % des infirmières, 90 % des caissières, 82 % des enseignantes de primaire, 90 % du personnel dans les EHPAD sont des femmes. Sans même parler du personnel de crèche et de garderie mobilisés pour garder les enfants de toutes ces femmes mobilisées en première ligne. Le personnel médical le dit clairement : nous avons besoin de soutien, de matériel médical et d’être reconnus comme des professionnels, pas comme des héros. Il n’est pas question de les sacrifier. Au contraire, il faut savoir les protéger, en prendre soin pour que leurs compétences et leurs capacités puissent être mobilisés sur le long terme. (…) Lutter contre le coronavirus c’est instituer la solidarité et le soin comme les principes cardinaux de nos vies. La solidarité et le soin. Pas les valeurs martiales et belliqueuses. (…) »
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Dès maintenant !, de Serge Halimi – Le Monde Diplomatique – 1er avril 2020
Extraits :
« (…) Corollaire du « Restez chez vous » et de la « distanciation », l’ensemble de nos sociabilités risquent d’être bouleversées par la numérisation accélérée de nos sociétés. L’urgence sanitaire rendra encore plus pressante, ou totalement caduque, la question de savoir s’il est encore possible de vivre sans Internet. Chacun doit déjà détenir des papiers d’identité sur lui ; bientôt, un téléphone portable sera non seulement utile, mais requis à des fins de contrôle. Et, puisque les pièces de monnaie et les billets constituent une source potentielle de contamination, les cartes bancaires, devenues garantie de santé publique, permettront que chaque achat soit répertorié, enregistré, archivé. « Crédit social » à la chinoise ou « capitalisme de surveillance », le recul historique du droit inaliénable de ne pas laisser trace de son passage quand on ne transgresse aucune loi s’installe dans nos esprits et dans nos vies sans rencontrer d’autre réaction qu’une sidération immature. Avant le coronavirus, il était déjà devenu impossible de prendre un train sans décliner son état-civil ; utiliser en ligne son compte en banque imposait de faire connaître son numéro de téléphone portable ; se promener garantissait qu’on était filmé. Avec la crise sanitaire, un nouveau pas est franchi. À Paris, des drones surveillent les zones interdites d’accès ; en Corée du Sud, des capteurs alertent les autorités quand la température d’un habitant présente un danger pour la collectivité ; en Pologne, les habitants doivent choisir entre l’installation d’une application de vérification de confinement sur leur portable et des visites inopinées de la police à leur domicile. Par temps de catastrophe, de tels dispositifs de surveillance sont plébiscités. Mais ils survivent toujours aux urgences qui les ont enfantés.
Les bouleversements économiques qui se dessinent consolident eux aussi un univers où les libertés se resserrent. (…)
En ce sens, la crise du coronavirus pourrait constituer une répétition générale qui préfigure la dissolution des derniers foyers de résistance au capitalisme numérique et à l’avènement d’une société sans contact.
À moins que… À moins que des voix, des gestes, des partis, des peuples, des États ne perturbent ce scénario écrit d’avance. Il est courant d’entendre : « La politique, ça ne me concerne pas. » Jusqu’au jour où chacun comprend que ce sont des choix politiques qui ont obligé des médecins à trier les malades qu’ils vont tenter de sauver et ceux qu’ils doivent sacrifier. Nous y sommes. (…) »
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La démocratie à l’épreuve du coronavirus, de Samuel Hayat, Chargé de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) – 23 mars 2020
Extrait :
“(…) La démocratie telle que nous la connaissons, fondée sur l’élection de gouvernants supposés agir en faveur du peuple, est censée être le meilleur système politique, le mieux à même de protéger ses citoyens, de les consulter sur les décisions fondamentales, et de leur accorder une importance égale. Le coronavirus vient brutalement mettre cette supériorité démocratique en doute. (…)”
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Coronavirus : la Commission européenne réclame des données d’opérateurs téléphoniques pour évaluer l’effet des mesures de confinement, par Martin Untersinger – Le Monde – 25 mars 2020
Extrait :
« (…) Les opérateurs téléphoniques ont été mis à contribution dans de nombreux pays dans le monde pour comprendre l’épidémie, évaluer les mesures de confinement, voire, dans certains cas, contrôler leur application au niveau individuel. (….) »
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Dominique Méda : « La crise du Covid-19 nous oblige à réevaluer l’utilité sociale des métiers » – Pour l’Éco – 24 mars 2020
“(…) A l’avant, une armée de soignants se battant contre le coronavirus, les mêmes qui depuis des semaines hurlaient à l’appauvrissement de l’hôpital public. A l’arrière, des millions de confinés, forcés d’interroger l’utilité d’un quotidien temporairement empêché. Cette guerre sanitaire sans précédent affiche l’absurdité d’une hiérarchie sociale des métiers à repenser, estime Dominique Méda. (…)”
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Covid-19 : Yuval Harari anticipe les dérapages de la crise et appelle à un sursaut, article d’Annabelle Laurent – Usbek & Rica – 24 mars 2020
Extrait :
“Pour l’historien israélien, auteur notamment de Sapiens et Homo deus (Robert Laffont, 2011 et 2017), la crise que nous traversons peut constituer – à moins de faire les bons choix à très court terme – un point de basculement vers la surveillance de masse et le repli nationaliste. Il appelle dans les colonnes du Financial Times à un sursaut rapide. (…)
Harari propose au lecteur d’imaginer un gouvernement hypothétique qui demanderait à chaque citoyen de porter un bracelet biométrique surveillant sa température et son rythme cardiaque 24h/24. Les données seraient moulinées par les algorithmes du gouvernement, qui sauraient « que vous êtes malade avant même que vous le soyez, mais aussi où vous êtes allé, et qui vous avez croisé. »”
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Zoom, Google Meet, Classroom, Microsoft Teams, Youtube: la crise du coronavirus aggrave notre dépendance aux géants de la tech, de Gaël Hurlimann – Le Temps – 27 mars 2020
Extrait :
« (…) Toute notre infrastructure de crise dépend donc de la Californie. (…) Mais il y a un autre risque. Toutes ces communications, privées, professionnelles ou officielles sont hébergées par des acteurs qui se sont fait une spécialité d’analyser et exploiter les données de leurs utilisateurs. Google, par exemple, fait une démonstration de force en transcrivant automatiquement la voix de toute vidéoconférence tenue en anglais (le français arrive cette année).
Il y a donc dans les centres d’hébergement des GAFAM une trace de tous nos échanges de télétravailleurs et de citoyens. Il y a les devoirs de mon fils. Les discours de mes ministres. Les secrets de mon entreprise. Dûment transcrits, indexés et archivés. Cela ne poserait pas de problème si nous avions des solutions alternatives et si ces acteurs, ces dernières années, s’étaient révélés irréprochables dans leur gestion de nos données privées. (…) »
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Ce que dit le coronavirus de notre soumission à la surveillance, article de Olivier Tesquet – Telerama – 28 février 2020
Extrait :
« Une épidémie est toujours un phénomène politique. Aussi, que dit le COVID-19 de notre régime de pouvoir ? (…) »
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Pour Amazon, le coronavirus est une affaire très profitable, de Gaspard d’Allens – Reporterre – 23 mars 2020
Extrait :
“La crise sanitaire et le confinement d’une partie de la population mondiale profitent largement au géant du commerce électronique. Qui entend se rendre incontournable aux yeux des États. Et faire oublier qu’il est un champion de l’évasion fiscale.(…)”
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Amazon ment et continue de profiter de la crise, de Gaspard d’Allens – Reporterre – 26 mars 2020
Extrait :
“Vivement critiquée pour avoir profité de la crise du Covid-19, Amazon a cherché récemment à modifier son image. Samedi 21 mars, elle a annoncé officiellement vouloir concentrer « les capacités disponibles sur les articles les plus prioritaires et temporairement cesser de prendre des commandes sur certains produits moins prioritaires en France et en Italie ».
De nombreux journaux ont repris tel quel le communiqué, offrant un beau coup de pub à la multinationale. Mais, en réalité, sur le terrain, la situation ne semble pas avoir changé. Les travailleurs sont toujours soumis à de fortes cadences et à des risques sanitaires. (…)”
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Sans enseignants, la « pédagogie virtuelle » aggrave les inégalités, tribune d’instituteurs et de professeurs – Reporterre – 26 mars 2020
« Confinement oblige, l’Éducation nationale invite à la « continuité pédagogique », possible grâce au numérique. Or, selon les auteurs de cette tribune, « la pédagogie virtuelle n’existe pas », et « seuls les élèves éveillés, enfermés avec des parents désœuvrés au fort niveau d’études vont bénéficier d’une pédagogie efficace : l’instruction en famille ». (…) »
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Travail, famille, Wi-Fi, par Julien Brygo – Le Monde diplomatique – juin 2020
« Ce qui avançait à la vitesse d’un cheval au galop avant la pandémie de Covid-19 progresse désormais à celle des vents d’un typhon, emportant tout un chacun dans un nouveau monde, celui du « tout Internet ». Un test grandeur nature d’un monde sans contact. Hier les droits au chômage, l’obtention d’une carte d’identité, d’un titre de séjour ou de papiers pour son véhicule ; aujourd’hui les droits à un équipement sanitaire de base, mais aussi le travail, la santé, les loisirs, l’enseignement — et la famille. (…)
C’est pourtant un fait établi et reconnu par les autorités : les déconnectés sont très nombreux en France. En 2019, plus d’un Français majeur sur cinq rencontrait des difficultés avec Internet : c’est l’« illectronisme », terme barbare qui désigne l’illettrisme numérique. Pour les 15 % des personnes de 15 ans ou plus qui n’ont pas utilisé Internet au cours de l’année 2019 ou les 38 % des usagers qui déclarent manquer d’au moins une compétence informatique de base, un monde est en train de se refermer. (…) »
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COVID, confinement et grande conversion numérique, entretien de Xavier de La Porte avec Antonio Casilli, 28 septembre 2020
« Depuis le début de cette épidémie de COVID, je me dis qu’elle a un rapport avec le numérique. Un rapport profond. Mais je n’arrive pas vraiment à en cerner les contours. J’ai voulu essayer de comprendre si ce moment que nous avons vécu a changé quelque chose à nos vies numériques, à notre rapport à Internet. (…) »
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